02 . 03 . 19

Le Carré de la Fosse: un premier espace collectif pour Trois-Rivières

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Crédit Jane Doe

Après Montréal et Québec, la Ville de Trois-Rivières se lance elle aussi dans la belle aventure des espaces collectifs. Inauguré le 14 juin dernier, le Carré de la Fosse fait la preuve que, en mobilisant les forces vives de toute une communauté, il est possible de transformer rapidement un lieu désuet et mal aimé en espace public distinctif, collaboratif, éducatif, participatif et intergénérationnel. Petite histoire d’une superbe réalisation collective.

Premier espace public aménagé à l’extérieur de l’ancien bourg fortifié de Trois-Rivières, en 1815, le Carré de la Fosse a connu des fortunes diverses au cours des siècles. Redevenu propriété de la municipalité au cours des dernières années, il n’était plus qu’un terrain en friche sans vocation, en dépit de son intéressante localisation, qui en fait l’une des portes d’entrée du centre-ville.

Plus récemment, ce lot servait de stationnement temporaire durant les travaux de construction du Centre d’événements et de congrès inter@ctifs de Trois-Rivières, ce qui avait donné l’idée à son promoteur de présenter une demande officielle à la Ville pour en faire l’acquisition et l’aménager de manière plus permanente. Pour Marc-André Godin, chef de service – planification et programmes à la Ville de Trois-Rivières, il était clair qu’il ne s’agissait pas là d’une avenue souhaitable pour revitaliser ce lieu. « Pour poliment décliner l’offre de cession, explique-t-il, il fallait trouver une bonne raison. Et vite ! »

Déjà familier avec le concept des espaces publics collaboratifs, Marc-André Godin y a vu là une belle occasion à saisir : « Vous savez, si on entre dans la logique de l’aménagement d’un parc en bonne et due forme, ça entraîne de longues démarches et surtout des coûts importants. C’est à ce moment que j’ai eu l’idée d’en faire un espace public collaboratif. Un lieu structurant, significatif, en lien avec le Centre des congrès et avec les commerçants de la rue Notre-Dame. »

Crédit photographie – Jean-Caisse Monet

Des astres bien alignés.

Tandis que Marc-André Godin poursuivait ses réflexions, 100º organisait, à l’automne 2018, son premier grand événement, Créer l’impact, justement au Centre d’événements et de congrès inter@ctifs de Trois-Rivières. C’est Jérôme Glad, cofondateur de La Pépinière | Espaces collectifs, qui avait pour tâche de prononcer la conférence d’ouverture.

Directeur des communications et du développement numérique chez Québec en Forme et citoyen de Trois-Rivières, Frédéric Therrien se souvient d’avoir été marqué et particulièrement inspiré par cette conférence. « Je me suis dit, confie-t-il : “mais pourquoi on ne pourrait pas aménager, nous aussi, un espace collectif, en Mauricie, dans ma ville ?” Alors, après avoir un peu exploré l’idée, sans même connaître les démarches de la Ville, nous sommes allés rencontrer Denis Roy, conseiller municipal du district Marie-de-l’incarnation, qui est aussi bien connu pour avoir été co-initiateur des CreativeMornings à Trois-Rivières et d’urbaloko. »

Déjà intéressé aux événements éphémères et au « piratage urbain », Denis Roy se souvient de cette étrange synchronicité. « À cette époque, j’entends parler de réflexions en cours à la Ville pour donner une vocation au Carré de la Fosse autre que celle d’un simple stationnement. Et presque en même temps, 100º m’approche pour me dire que l’organisation serait intéressée d’apporter son soutien financier pour l’aménagement d’un espace collectif… On ne peut pas imaginer une plus favorable convergence d’intérêts ! »

Crédit photographie – Jean-Caisse Monet

Entre temps, Marc-André Godin avait déjà mis sur pied une table de concertation réunissant plusieurs partenaires, dont IDÉ Trois-Rivières, Trois-Rivières Centre, Culture Trois-Rivières, Démarche des Premiers Quartiers, en plus de différentes directions municipales, ainsi que des commerçants. Puis, janvier 2019, Denis Roy invite 100º à la table de concertation.

« La vingtaine de partenaires présents étaient vraiment tous en mode “action”, se souvient Frédéric Therrien. Nous avions seulement 6 mois pour inaugurer l’espace collectif. J’ai expliqué que 100º souhaitait apporter sa contribution financière, mais à condition de retenir les services de la Pépinière. J’ai fait valoir l’importance cruciale de la participation citoyenne pour assurer le succès d’un tel projet et que seule la Pépinière possédait l’expertise nécessaire en la matière. »

Chargée de projet des processus participatifs à la Pépinière, Céline Duhamel a joué le rôle d’accompagnatrice pour le développement, le déploiement et la pérennisation du projet du Carré de la Fosse. « Il est nécessaire d’ancrer ce genre de projet dans son milieu, affirme-t-elle. Ça prend la mobilisation de tous les acteurs, non seulement des institutions et des organismes, mais aussi des citoyens. C’est ça l’essence même d’une ville participative. »

« C’est en consultant les citoyens, pour bien connaître leurs attentes, enchaîne-t-elle, et en les impliquant dans des ateliers de co-création, de co-travail, que l’on parvient à créer un lien d’appartenance collectif avec l’aménagement et les personnes impliquées. Ce lien d’attachement n’existe pas dans un espace public ordinaire. L’idée, c’est de faire du citoyen un acteur au lieu de le confiner au simple rôle de spectateur. C’est la grande différence entre un espace public et un espace collectif. »

Crédit photographie – Jean-Caisse Monet

Sortir du carré de… sable

Marc-André Godin se souvient que, au départ, la partie n’était pas gagnée d’avance. « J’ai dû mettre un peu d’huile de coude pour convaincre les services des loisirs, de la culture, des travaux publics et du génie, pour qu’ils voient ce projet d’un bon œil. Disons que cela a bousculé certaines conceptions ! Mais il fallait pousser la machine afin d’accompagner tous ces gens qui avaient répondu à l’appel en vertu de leur bonne volonté. Qui tous se dévouaient pour la même cause. Honnêtement, c’était beau à voir ! »

Pour Denis Roy, Marc-André Godin était l’homme de la situation. « Il a joué un rôle primordial pour convaincre les différents acteurs de l’administration municipale. Pour moi, la tâche était nettement plus facile. J’ai présenté ainsi la chose à mes collègues : investissement minimal pour un impact maximal. Ça n’a pas fait l’objet d’un long débat. D’ailleurs, beaucoup de conseillers municipaux comprennent l’importance des enjeux de densification, de mixité et de qualité de vie. Ils étaient déjà réceptifs. »

Crédit photographie – Jean-Caisse Monet

Aménagements transitoires

« On a besoin, en urbanisme et en aménagement, de faire intervenir la créativité et l’innovation sociale, parce que c’est un domaine très réglementé et contraignant, plaide Denis Roy. Il faut sortir de ce cadre très normé pour se permettre de rêver. Et se donner la permission de se tromper. Il faut oser poser des gestes qui ne sont pas immuables, permanents, ni d’ailleurs parfaits. À Montréal, ils utilisent une expression que j’aime bien : aménagements transitoires. Donc, on tente une démarche et au bout de quelques années, ce qui fonctionne, on le conserve, on lui donne une vocation permanente, jusqu’à la prochaine fois… »

Sans surprise, Marc-André Godin partage ce même point de vue. « Avant, souligne-t-il, les urbanistes travaillaient strictement dans leurs bureaux. Mais de nos jours, ils se rendent sur place afin de tenir compte des besoins des commerçants et des citoyens dans une démarche plus participative. Ils impliquent la communauté dans la mise en œuvre d’aménagements transitoires qui à force d’être bonifiés vont prendre un caractère permanent. C’est ça le Carré de la fosse : un banc d’essai. C’est un projet pilote, déjà couronné de succès ! »

Crédit photographie – Jean-Caisse Monet

Les retombées

« On a besoin, en urbanisme et en aménagement, de faire intervenir la créativité et l’innovation sociale, parce que c’est un domaine très réglementé et contraignant, plaide Denis Roy. Il faut sortir de ce cadre très normé pour se permettre de rêver. Et se donner la permission de se tromper. Il faut oser poser des gestes qui ne sont pas immuables, permanents, ni d’ailleurs parfaits. À Montréal, ils utilisent une expression que j’aime bien : aménagements transitoires. Donc, on tente une démarche et au bout de quelques années, ce qui fonctionne, on le conserve, on lui donne une vocation permanente, jusqu’à la prochaine fois… »

Sans surprise, Marc-André Godin partage ce même point de vue. « Avant, souligne-t-il, les urbanistes travaillaient strictement dans leurs bureaux. Mais de nos jours, ils se rendent sur place afin de tenir compte des besoins des commerçants et des citoyens dans une démarche plus participative. Ils impliquent la communauté dans la mise en œuvre d’aménagements transitoires qui à force d’être bonifiés vont prendre un caractère permanent. C’est ça le Carré de la fosse : un banc d’essai. C’est un projet pilote, déjà couronné de succès ! »